
Nous associons immédiatement Jean de La Fontaine à sa principale oeuvre : Les fables. Il y en a 243 au total, publiées dans quatre tomes différents, en 1668, 1678 et 1679. Les fables de La Fontaine les plus connues sont :
- Le Corbeau et le Renard
- Le Lièvre et la Tortue
- La Cigale et la Fourmi
- Le Loup et l’Agneau
- La Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le Boeuf
- Le Chêne et le Roseau
- Le Renard et la Cigogne
- La Laitière et le pot au lait
- Le Rat des villes et le Rat des champs
S’il est aujourd’hui l’auteur de fables le plus connu, ce n’est pas pour autant lui qui a inventé ce genre littéraire. La fable est une forme de récit utilisée depuis l’Antiquité. En revanche c’est lui qui lui redonne ses titres de noblesse au XVIIe siècle.
Le premier recueil de La Fontaine est destiné au fils du roi Louis XIV, le Grand Dauphin. Il a une fonction pédagogique : ces petites histoires sont destinées à éduquer le fils du roi. En outre, les fables de La Fontaine sont particulièrement proches de la poésie. Effectivement, avant lui, c’était la prose qui était utilisée et elle donnait un aspect peu attrayant à la fable. La Fontaine donne donc un nouveau style poétique à la fable.
Qu’est-ce qu’une fable ?
Une fable est une histoire courte, écrite en vers, qui contient une morale généralement explicite. Elle met en scène des personnages fictifs dans une histoire d’apparence naïve, mais qui est en réalité une allégorie. Chez La Fontaine, ces personnages peuvent être des animaux ou des objets personnifiés* ou encore des hommes. Quoi qu’il en soit, ils incarnent totalement un trait de caractère déterminé afin d’être universellement reconnus par les lecteurs. Les personnages sont définis par une nature profonde contre laquelle ils ne peuvent pas lutter.
Encore aujourd’hui dans les écoles françaises, les fables sont apprises et récitées comme des poésies. Elles permettent de travailler la mémoire et de restituer un contenu appris par coeur. Les fables de La Fontaine font partie du patrimoine littéraire et culturel français. Leur apprentissage dès l’école primaire permet de faire perdurer ce patrimoine, de le transmettre et de le faire connaître aux jeunes générations.
* Caractéristiques humaines attribuées à un animal ou à un objet. Ici, ce sont les animaux qui ont la faculté de parler.
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Comment lire une fable ?
Lorsqu’on entame la lecture d’une fable, on sait déjà qu’une morale nous attend en bas de la page, si ce n’est pas dès la première ligne ! L’essence même de la fable est de faire réfléchir le lecteur grâce à la mise en scène de personnages identifiables. Ils ont une personnalité immuable, c’est-à-dire que l’agneau sera, dans une même histoire, uniquement gentil et innocent tandis que le loup sera hypocrite et cruel, comme dans Le Loup et l’Agneau par exemple.
Les détails de l’histoire permettent de s’y projeter facilement, ce qui rend la lecture accessible aux enfants. Jean de La Fontaine le disait lui-même, les enfants doivent s’instruire, et pour cela rien n’est plus utile que la fable ! Selon lui, « On ne saurait s’accoutumer de trop bonne heure à la sagesse et à la vertu ». Cela implique donc que le devoir des artistes est d’éduquer les hommes dès leur plus jeune âge. Ainsi, tout lecteur doit avoir tiré une leçon de la lecture d’une fable, sans quoi le travail de l’écrivain resterait inachevé.
Une critique de son siècle
À travers la rédaction de ses fables, Jean de La Fontaine fait une critique de son époque. Ses oeuvres, quelles qu’elles soient, sont un moyen pour lui de s’engager pour ou contre une cause. Par exemple, il écrit Élégie aux nymphes de Vaux (1661) pour défendre son protecteur Nicolas Fouquet, qui est alors en disgrâce auprès du roi. Dans certaines de ses fables, La Fontaine fait une critique de la Monarchie absolue qui règne et menace parfois l’équilibre du pays. Il dénonce également la militarisation croissante ou le développement accru de l’économie aux dépens de la morale religieuse. Par exemple, La Fontaine dénonce le pouvoir et la justice sous le règne de Louis XIV dans Le Loup et l’Agneau : le loup, plus fort physiquement, plus puissant et plus catégorique, condamne l’agneau d’emblée avant même qu’il ait pu se défendre. Dans La Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le Boeuf, La Fontaine critique ouvertement les nobles et les bourgeois qui ont une ambition démesurée les poussant à la folie.
Par conséquent, on peut définir La Fontaine comme un écrivain engagé. Il dénonce la politique de son temps mais s’engage aussi dans le monde littéraire. Dans la querelle des Anciens et des Modernes, il prit parti pour les Anciens, c’est-à-dire ceux qui prônaient une écriture esthétiquement classique, héritée de l’Antiquité. C’est d’ailleurs cette même Antiquité qui établit la fable comme un modèle fondamentalement instructif.
Qui est Jean de La Fontaine ?
Jean de La Fontaine est né le 8 Juillet 1621 à Château-Thierry, un village de l’Aisne. À l’âge de 15 ans, il part finir ses études à Paris et s’oriente vers le droit pour finalement devenir « avocat en la cour de Parlement ». Son goût de l’écriture est déjà développé et il publie sa première oeuvre, une pièce de théâtre intitulée l’Eunuque, en 1654. Bien qu’elle soit publiée anonymement, elle connait un grand succès. C’est le début d’une longue carrière pour cet amoureux des belles lettres.
En 1647, il épouse Marie Héricart et en 1653 nait leur fils unique, Charles. Il occupe la fonction de Maître des Eaux et Forêts de 1652 à 1670, tout en écrivant à partir de 1663. Lorsqu’il se consacrera à sa carrière d’écrivain, Jean de La Fontaine devra trouver protection auprès de plusieurs mécènes. Il deviendra le protégé de différentes personnalités dont la plus célèbre sera le surintendant des Finances, Nicolas Fouquet. En effet à l’époque, les artistes étaient dépendants des mécènes car il n’existait pas de droits d’auteurs pour les rémunérer. Ils devaient donc trouver des bienfaiteurs qui acceptaient de leur verser une pension afin de vivre de leur art. C’est ce qui a permis à la Fontaine de vivre de son écriture…
De toutes les oeuvres de La Fontaine, ce sont définitivement ses fables qui ont connu le plus grand succès, fulgurant et immédiat. Cependant, notre auteur a également signé des romans, pièces de théâtre ou encore des contes. La Fontaine s’est essayé à une multitude de genres, rendant son oeuvre particulièrement diverse pour l’époque. Mais malgré son écriture de qualité, il doit attendre 1684 pour entrer à l’Académie Française. Il meurt le 13 Avril 1695 à Paris et laisse derrière lui une oeuvre qui traversera les siècles.
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Détournement des fables
Des proverbes inspirées des fables
De nombreuses morales des fables de La Fontaine sont devenues des dictons et proverbes de tous les jours : « on a toujours besoin d’un plus petit que soi », « rien ne sert de courir il faut partir à point », « la méfiance est mère de sureté »… Certaines ont même fait l’objet de véritables expressions comme « montrer patte blanche » qui vient de la fable Le Loup, la Chèvre et le Chevreau (repris également dans l’histoire Le Loup et les 7 chevreaux) et qui signifie prouver son identité, démontrer que l’on est fiable et que l’on correspond aux critères. Ou encore « il ne faut jamais vendre la peau de l’ours qu’on ne l’ait mis par terre » dans L’Ours et les deux Compagnons, devenue la célèbre expression « il ne faut jamais vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué » qui signifie ne jamais considérer comme acquis quelque chose avant de l’avoir véritablement obtenu.
Des publicités inspirées des fables
En 1998, la célèbre marque de boisson gazeuse Badoit© s’inspire des deux personnages de la fable La Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le Boeuf pour son spot publicitaire. Ancrées dans le patrimoine littéraire et culturel français, les fables de La Fontaine sont universelles. Cette marque se sert alors des personnages et de la morale de la fable pour s’adresser au plus grand nombre de téléspectateurs et ainsi les inciter à consommer le produit. C’est grâce à la boisson gazeuse que la grenouille voit la vie autrement et se sent ainsi plus forte. Un an après, ce sera au tour du lièvre et de la tortue de faire l’objet d’une publicité par cette même marque au caractère comique.
Puis, en 2000, c’est autour de la marque de fromage Boursin© de s’inspirer d’une fable de La Fontaine : Le Corbeau et le Renard, sur un air de comédie musicale. Orangina© s’inspirera également de la même fable quatorze ans plus tard réinventée par l’humoriste et acteur Jamel Debbouze (le renard est attiré non pas par un fromage, mais par la boisson gazeuse !). Enfin, récemment aux États-Unis cette fois, la marque de voiture Mercedes© met en scène la course qui oppose le lièvre et la tortue. Grâce à la voiture, la tortue l’emporte : « rien ne sert de courir, il faut partir en Mercedes » est leur slogan. À quand la prochaine revisite de fable ?
Combien de fables a écrit Jean de La Fontaine expliqué en vidéo
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