Matin brun

Matin brun

9-12 ans - 21 pages, 1741 mots | 14 minutes de lecture | © Callicéphale, 2018, pour la 1ère édition - tous droits réservés


Matin brun

9-12 ans - 14 minutes

Matin brun

Matin brun est une nouvelle de l’auteur français Franck Pavloff qui s’est vendue à plus de 2 millions d’exemplaires en France et a été traduite dans plus de 20 langues. L'auteur raconte comment un régime totalitaire peut se mettre en place rapidement par manque de vigilance ou si, par peur ou soumission, nous acceptons de perdre des libertés fondamentales.

"Matin brun" vous est proposé à la lecture version illustrée, ou à écouter en version audio racontée par des conteurs et conteuses. En bonus, grâce à notre module de lecture, nous vous proposons pour cette histoire comme pour l’ensemble des contes et histoires une aide à la lecture ainsi que des outils pour une version adaptée aux enfants dyslexiques.
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Raconté par Nicolas

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Comment Matin brun décrit-il la montée d’un régime totalitaire ?

Matin brun raconte la montée en puissance d’un “État brun” mettant en place des “lois brunes”, où tout ce qui n’est pas “brun” est banni. Cela commence par les animaux domestiques ; d’abord les chats, puis les chiens. Puis les journaux, puis les maisons d’édition ; les nouvelles répressions s’enchaînent, avec toujours plus de violence...

Matin brun montre que ne pas résister face aux oppressions quotidiennes laisse la porte ouverte au totalitarisme. Un État totalitaire peut s’imposer par petites touches, en augmentant peu à peu son emprise sur la population. 

Où se passe l’histoire de Matin brun ?

Matin brun se déroule dans un lieu indéfini. Le personnage principal ne parle que de “l’État national” puis “État brun”. L’auteur, Franck Pavloff, laisse le lecteur s’interroger sur le lieu de l’histoire. Elle pourrait donc avoir lieu n’importe où...

Qui sont les personnages de Matin brun ?

Le personnage principal n'est jamais nommé. Comme il parle à la première personne, en disant “Je”, on ne connaît pas son prénom. Son meilleur ami s’appelle Charlie. Ils ont tous les deux des animaux de compagnie et aiment passer du temps ensemble, même s’ils ne s’écoutent pas toujours ou ne parlent pas des choses les plus importantes : “on s’est quittés, mais avec une drôle d’impression. Comme si on ne s’était pas tout dit.” 

Quel est le sens du titre Matin brun ?

Le terme de « brun » du titre Matin brun fait écho au surnom donné aux miliciens nazis (les SA ou Sections d’Assaut) durant la montée du nazisme à l’aube de la seconde Guerre mondiale : les « Chemises brunes ». Le nazisme a notamment été surnommé « la peste brune ». D’une manière générale, le brun et le noir sont traditionnellement associés aux mouvements fascistes, parmi lesquels le premier d’entre eux est le fascisme mussolinien, en Italie, où la milice volontaire pour la sécurité nationale choisit le noir, en 1923. 

Le titre reprend également en la transformant l’expression « matin gris » : le matin représente le début, le commencement de quelque chose et le brun fait référence à quelque chose de sale, de péjoratif. 

Quelles sont les interdictions dans Matin brun ?

Les interdictions dans Matin brun sont nombreuses et successives :  

  • Ce sont d’abord les chats autres que bruns qui sont interdits (selon les tests de sélection de cet état totalitaire, les chats bruns s’adaptent mieux à la vie en ville et mangent moins), puis les chiens (les chiens bruns étant jugés plus résistants).  
  • Passer l’étape des animaux de compagnie, c’est la culture et l’information qui sont mises à mal : un journal est interdit pour s’être attaqué au régime, puis les maisons d’édition du même groupe.  
  • Enfin, même la parole des personnages n’est plus libre, ils s’interdisent de penser ouvertement et ajoutent le mot « brun » dans toutes leurs phrases.  
  • Après quoi, ce sont les hommes et les femmes qui ont eu des chats ou des chiens autres que bruns qui sont poursuivis et emmenés par la milice. 

Pourquoi Matin brun est-il un apologue ? Quelle est la morale de Matin brun ?

Un apologue est une histoire courte dont se dégage une morale. Matin brun encourage le lecteur à se poser des questions et à ne pas baisser les bras quand on le prive de ses libertés, même quand cela ne paraît “pas si grave”, au premier abord.  

Selon Franck Pavloff lui-même, “Matin Brun n’est pas un livre qui donne des recettes, mais un texte qui, sans faire la morale, interroge le lecteur, le traite en responsable, quel que soit son âge, son sexe, sa condition sociale.” La réponse à “quelle est la morale de Matin brun” varie selon les lecteurs, puisque ce sont eux qui doivent la trouver ! 

Pourquoi Matin brun est une œuvre engagée ?

Matin Brun est une œuvre engagée en raison de son contenu et de sa morale dissimulée. En effet, Pavloff critique le totalitarisme et amène les lecteurs à réfléchir à la liberté individuelle et à la résistance face à l’oppression et au racisme. Publiée seulement quelques décennies après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, et pendant la montée du Front National, un parti d’extrême-droite français, dans les années 1990, Pavloff incite les lecteurs à faire preuve de discernement. Cette nouvelle aborde la conformité aveugle et la manipulation de masse, cherchant à sensibiliser particulièrement les jeunes lecteurs à l’endoctrinement, à  l’oppression et surtout à l’importance des libertés fondamentales. Ainsi, Matin Brun est une œuvre engagée par son message et son appel à la résistance.

Extrait du livre Matin brun

Matin brun de Franck Pavloff et Alexandra Grela aux éditions Callicéphale


Les jambes allongées au soleil, on ne parlait pas vraiment avec Charlie, on échangeait des pensées qui nous couraient dans la tête, sans bien faire attention à ce que l’autre racontait de son côté. Des moments agréables, où on laissait filer le temps en sirotant un café.
Lorsqu’il m’a dit qu’il avait dû faire piquer son chien, ça m’a surpris, mais sans plus. C’est toujours triste un clebs qui vieillit mal, mais passé quinze ans, il faut se faire à l’idée qu’un jour ou l’autre il va mourir. – Tu comprends, je pouvais pas le faire passer pour un brun. – Ben, un labrador, c’est pas trop sa couleur, mais il avait quoi comme maladie ? – C’est pas la question, c’était pas un chien brun, c’est tout. – Mince alors, comme pour les chats, maintenant ? – Oui, pareil. Pour les chats, j’étais au courant. Le mois dernier, j’avais dû me débarrasser du mien, un de gouttière qui avait eu la mauvaise idée de naître blanc, taché de noir.
C’est vrai que la surpopulation des chats devenait insupportable, et que d’après ce que les scientifiques de l’État national disaient, il valait mieux garder les bruns. Que des bruns. Tous les tests de sélection prouvaient qu’ils s’adaptaient mieux à notre vie citadine, qu’ils avaient des portées peu nombreuses et qu’ils mangeaient beaucoup moins. Ma foi, un chat c’est un chat, et comme il fallait bien résoudre le problème d’une façon ou d’une autre, va pour le décret qui instaurait la suppression des chats qui n’étaient pas bruns. La plupart des chefs religieux approuvaient cette mesure.
Les milices de la ville distribuaient gratuitement des boulettes d’arsenic. Mélangées à la pâtée, elles expédiaient les matous en moins de deux. Mon cœur s’était serré, puis on oublie vite.
Les chiens, ça m’avait surpris un peu plus, je ne sais pas trop pourquoi, peut-être parce que c’est plus gros, ou que c’est le compagnon de l’homme, comme on dit. En tout cas, Charlie venait d’en parler aussi naturellement que je l’avais fait pour mon chat, et il avait sans doute raison. Trop de sensiblerie ne mène pas à grand-chose, et pour les chiens, c’est sans doute vrai que les bruns sont plus résistants. On n’avait plus grand-chose à se dire, on s’était quittés, mais avec une drôle d’impression. Comme si on ne s’était pas tout dit. Pas trop à l’aise. Quelque temps après, c’est moi qui avais appris à Charlie que le Quotidien de la ville ne paraîtrait plus. Il en était resté sur le cul : le journal qu’il ouvrait tous les matins en prenant son café-crème ! – Ils ont coulé ? Des grèves, une faillite ?
– Non, non, c’est à la suite de l’affaire des chiens. – Des bruns ? – Oui, toujours. Pas un jour sans s’attaquer à cette mesure nationale. Ils allaient jusqu’à remettre en cause les résultats des scientifiques.