Le Magicien d'Oz

Le Magicien d'Oz

9-12 ans - 74 pages, 19756 mots | 2 heures 23 minutes de lecture
© Alzabane, 2025, pour la 1ère édition - tous droits réservés

Le Magicien d'Oz

9-12 ans - 2 heures 23 minutes

Le Magicien d'Oz

Nous connaissons tous, au moins de nom, Le Magicien d’Oz. Ce monument de la littérature jeunesse américaine, étudié dans les classes des États-Unis et adapté sous toutes les formes, est pourtant longtemps resté en Europe très peu lu. Depuis les années 2000, le public français le redécouvre et c’est une adaptation extraordinaire que nous vous proposons. Magnifiquement illustrée par Jonathan Bousmar, suivant un scénario de Jean-Sébastien Blanck, elle ne se contente pas de raconter le voyage de Dorothée et de ses amis vers la Cité d’Émeraude. Elle amorce aussi Le Merveilleux pays d’Oz, soit la première des 13 suites de Lyman Frank Baum, véritable saga qu’on appellera plus tard le cycle d’Oz.

"Le Magicien d'Oz" vous est proposé à la lecture version illustrée, ou à écouter en version audio racontée par des conteurs et conteuses. En bonus, grâce à notre module de lecture, nous vous proposons pour cette histoire comme pour l’ensemble des contes et histoires une aide à la lecture ainsi que des outils pour une version adaptée aux enfants dyslexiques.
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Extrait du livre Le Magicien d'Oz

Le Magicien d'Oz de Lyman Frank Baum, adapté par Jean-Sébastien Blanck et illustré par Jonathan Bousmar aux éditions Alzabane


Le Magicien d'Oz
Dorothée vivait au milieu des vastes plaines du Kansas, avec son oncle Henry — qui était fermier — et sa tante Em, la femme de celui-ci. Leur maison en bois se limitait à quatre murs, un plancher et un toit. Tout cela constituait l’unique pièce où se côtoyaient un poêle rouillé, un vaisselier, une table, trois ou quatre chaises et deux lits. Celui d’oncle Henry et de tante Em occupait un coin, et celui de Dorothée l’autre coin. La maison ne comportait ni grenier ni cave, hormis un petit trou creusé à même le sol, appelé « abri anticyclonique ». La famille s’y réfugiait lors de ces épouvantables coups de vent dont la force dévaste tout sur son passage. On y accédait par une trappe située au centre de la pièce. Lorsque Dorothée regardait tout autour d’elle, elle ne voyait rien d’autre que la plaine grise qui s’étendait à perte de vue. Pas un arbre, pas une construction ne se dressait dans l’immensité du paysage. Le soleil avait cuit la terre jusqu’à en faire une masse grise, ravinée de crevasses. Autrefois, la maison avait été peinte, mais le soleil et le vent avaient boursouflé la peinture. La pluie s’étant chargée du reste. Elle était maintenant aussi grise que le paysage. Alors, souvent, Dorothée se demandait s’il existait un autre pays, un pays sans pareil, plus loin que la lune et l’arc-en-ciel. Elle rêvait alors de champs rouges, de lutins bleus et de cités aux toits d’or. Mais au lieu de ça, tout ce qu’elle voyait, c’était la maison grise et... tante Em qui, elle, ne rêvait jamais !
Lorsque tante Em s’installa ici, elle était encore jeune et jolie. Mais le soleil et le vent l’avaient transformée, elle aussi, comme sa maison. Ils avaient décoloré le rose de ses joues et de ses lèvres et ils l’avaient changé en gris. C’est ainsi qu’elle devint maigre et cessa de sourire. Alors, quand Dorothée, orpheline, vint vivre avec eux, tante Em fut saisie par le rire de l’enfant. Chaque fois qu’il parvenait à ses oreilles, elle portait la main à son cœur. Elle regardait la fillette avec étonnement en se demandant ce qui pouvait bien la faire rire comme ça. Quant à oncle Henry, il ne riait absolument jamais. Il travaillait dur du matin au soir et ignorait ce qu’on appelle le « plaisir ». Comme la plaine, comme sa maison, et comme Em, il était gris, depuis sa longue barbe jusqu’à ses bottes. Il portait un air grave et sévère et parlait peu. Dorothée le trouvait aussi raide et ébouriffé qu’un épouvantail. Quand il marchait, elle croyait l’entendre grincer comme un vieil automate tout en métal rouillé. Il ne souriait presque jamais, comme s’il craignait que ses mâchoires restent bloquées. Il ne pleurait jamais non plus, comme s’il n’y avait plus de larmes au fond de ses yeux secs. Ce qui faisait rire Dorothée, c’était Toto, son petit chien. C’est lui qui l’empêchait de devenir aussi grise que tout le reste. Toto, il n’était pas gris, mais noir, avec de longs poils soyeux et des petits yeux qui pétillaient gaiement de chaque côté de sa truffe. Il passait ses journées à jouer avec Dorothée qui l’aimait beaucoup. Mais un jour, tandis qu’ils ne jouaient pas et que tante Em faisait la vaisselle, oncle Henry scruta le ciel avec inquiétude. Dorothée le rejoignit sur le seuil avec Toto dans les bras. Le ciel était vraiment plus gris que d’habitude. Loin au nord, on entendait la plainte du vent. Puis, ils virent les hautes herbes onduler, puis se coucher par vagues, avant qu’un sifflement aigu venant du sud ne se fasse entendre. Une tempête ! « Em ! s’écria oncle Henry. Il y a un cyclone qui arrive ! Je m’occupe des bêtes ! » Il se précipita vers les étables tandis qu’au premier coup d’œil, tante Em comprit l’imminence du danger. « Vite, Dorothée, cria-t-elle, cours à la cave ! » Toto s’échappa des bras de la fillette et alla se cacher sous le lit. Dorothée se précipita pour le rattraper. Tante Em, effrayée, ouvrit la trappe et descendit par l’échelle dans le petit trou sombre. Dorothée finit par rattraper Toto et se préparait à suivre sa tante, quand, après avoir parcouru la moitié du chemin, le vent se mit à rugir et à secouer la maison dans tous les sens. Dorothée trébucha et sentit qu'elle perdait ses souliers. La jeune fille se retrouva aussitôt par terre. Le plancher vibrait, les murs craquaient comme si toute la bâtisse allait s’envoler. Il se passa alors cette chose étrange, qui n'arrive que dans les rêves...
La maison tourna d’abord sur elle-même, deux ou trois fois, avant de s’élever lentement dans les airs. Dorothée se crut à bord d’un ballon. Il faisait très sombre et le vent, au-dehors, hurlait horriblement. Toutefois, lorsque la maison eut atteint le sommet du cyclone, Dorothée s’aperçut que les choses n’allaient pas si mal. Elle eut même l’impression qu’on la berçait avec douceur, comme un bébé dans son berceau. Toto, lui, n’appréciait pas du tout ! Il parcourait la pièce de long en large, allant d’un côté à un autre, en aboyant bruyamment et, finalement, il vint rejoindre Dorothée qui avait déjà surmonté sa peur. Jusque-là, rien de terrible ne s’était produit. Elle décida d’attendre calmement et se coucha dans son lit. Toto la suivit et s’installa avec elle. Pendant les heures qui suivirent, la maison fut transportée comme une plume sur des lieues et des lieues. Le balancement de la maison et le hurlement du vent berça si bien Dorothée qu’elle ferma les yeux et s’endormit profondément.
Avant-Propos Hormis Alice au pays de merveilles, Le Petit Prince, ou encore Pinocchio, peu de romans jeunesse ont connu la notoriété du Merveilleux Magicien d’Oz. The Wonderful Wizard of Oz fut publié en 1900 aux États-Unis... L’auteur, Lyman Frank Baum, rencontra un succès si fulgurant qu’il publia jusqu’en 1920 pas moins de treize suites auxquelles il faut ajouter les vingt et une signées par Ruth Plumpy Thompson entre 1920 et 1940. Si une comédie musicale à Broadway avait déjà enfoncé le clou dès 1903, c’est le cinéma qui paracheva la consécration, en 1939, avec un film mémorable, diffusé à la télévision américaine pendant des générations. Ajoutons enfin que le livre est étudié dans les classes américaines depuis plus d’un siècle. Un triomphe total, donc. Du moins, aux États-Unis... Car en Europe, la carrière du livre resta longtemps confidentielle : en France, on ne le traduisit qu’à partir de 1932, sous forme abrégée, et il ne fut que peu lu avant les années 1970. Quant aux treize suites, elles ne furent même pas traduites. Sans doute le public, bercé par les contes de Perrault, d’Andersen ou des frères Grimm, ne s’est-il pas reconnu dans cet imaginaire anglo-saxon du Nouveau-Monde... Car Oz, venu du fin fond du Kansas, n’est pas qu’une série de livres. C’est aussi et surtout un univers, certes farfelu et humoristique, mais parfaitement codifié, doté de son histoire, de sa mythologie et de sa géographie à l’américaine. Ce n’est qu’au début des années 2000 que la notoriété du roman s’est vraiment installée en France. Elle le doit sans doute à quelques adaptations pour les jeunes lecteurs, mais peut-être aussi à l’engouement pour des œuvres comme Alice au pays des merveilles, auxquelles l’univers d’Oz est souvent associé. Elle le doit aussi à des sagas comme celles de Tolkien ou d’Harry Potter. Le cycle d’Oz et ses personnages à la Tim Burton sont ainsi considérés comme fondateurs de la fantasy américaine. Quant aux suites, quelques-unes ont enfin été traduites, même si elles restent toujours inconnues du grand public. Nous parions que cela changera rapidement, et c’est pourquoi notre adaptation ne s’arrête pas au Magicien d’Oz. Elle amorce dans notre dernier chapitre Le Merveilleux Pays d’Oz avec ce ton et ces dialogues plus burlesques, à la limite de l’absurde, qui auront cours dans les romans suivants... Le texte que vous lirez est très proche de l’originel. Toutefois, notre mise en page et la présence des illustrations ont impliqué de nombreuses coupes et arrangements, renforçant le ton comico-fantastique de l’œuvre. Par ailleurs, il laisse clairement entendre que toute cette aventure pourrait bien n’être qu’un songe. Quant aux cinquante illustrations de notre livre, elles ont été réalisées par Jonathan Bousmar, déjà salué pour de précédentes adaptations de la collection. Ceci étant dit, il ne reste plus qu’à te souhaiter, cher lecteur, un magnifique voyage haut en couleur, vers la Cité d’Émeraude. Jean-Sébastien Blanck
Du cyclone qui emporta Dorothée et Toto chez les Munchkins
Dorothée fut réveillée par un choc violent qui lui coupa le souffle ! Pendant quelques secondes, elle eut la sensation d’émerger d’un sommeil profond et elle cligna des yeux sans bouger. Elle s’aperçut que la maison ne remuait plus et que le soleil illuminait la pièce. Elle sauta du lit, courut à la porte — Toto sur ses talons — et après avoir ouvert la porte, elle poussa un cri d’admiration ! Le cyclone l’avait déposée au milieu d’un pays d’une beauté prodigieuse. Ici, de ravissants parterres de gazon verdoyaient sous des arbres fruitiers ! Là, un ruisseau au doux murmure coulait tranquillement ! Plus loin et de tous côtés, de superbes fleurs formaient des massifs. Des oiseaux au plumage éclatant chantaient et voletaient dans les buissons ! Tout à coup, tandis qu’elle dévorait des yeux ce spectacle merveilleux, elle aperçut trois hommes et une femme qui s’approchaient. Elle n’avait jamais vu d’êtres aussi bizarres. Ils ne mesuraient pas autant que les grandes personnes... sans pour autant être minuscules. En fait, ils semblaient à peu près de la taille de Dorothée, qui était une fillette. En revanche, ils paraissaient beaucoup plus vieux. Dorothée se dit qu’ils pouvaient avoir l’âge d’oncle Henry, car deux d’entre eux portaient la barbe. Ils étaient tous bizarrement costumés. Les hommes étaient coiffés de chapeaux bleus et en pointe, agrémentés de clochettes qui tintaient au moindre mouvement. Ils portaient des habits de la même couleur que leurs chapeaux et chaussaient des bottes bien cirées, ornées de revers bleu foncé. Quant à la petite femme, elle était coiffée d’un chapeau aussi blanc que sa robe. De magnifiques petites étoiles en parsemaient l’étoffe et scintillaient au soleil comme des diamants. Des rides couvraient son visage, ses cheveux viraient au blanc, et elle avançait lentement, les jambes un peu raides. Ces petites personnes s’arrêtèrent à quelques pas d’où se tenait Dorothée et chuchotèrent entre elles, comme effrayées d’aller plus loin. Puis, la petite vieille s’avança vers Dorothée, fit une grande révérence et, d’une voix douce, prononça ces mots : « Soyez la bienvenue, très noble fée, au pays des Munchkins. Nous vous sommes très reconnaissants d’avoir tué la méchante Sorcière de l’Est et d’avoir libéré notre peuple de l’esclavage ! » La jeune fille du Kansas écouta ces paroles avec de grands yeux ronds. Que voulait donc dire cette vieille petite femme, qui l’appelait fée et prétendait qu’elle avait tué la « méchante Sorcière de l’Est » ? Dorothée ne se voyait que comme une fillette sage et sans danger. Un cyclone l’avait emportée à des lieues et des lieues de chez elle, voilà tout. Jamais de sa vie, elle n’avait fait de mal à qui que ce soit.
— Vous êtes très aimable, mais vous vous trompez... Je n’ai tué personne... — Votre maison l’a fait en tout cas, répliqua la vieille femme en riant. Regardez ! poursuivit-elle en montrant un coin de la maison. On voit encore ses deux orteils qui dépassent en dessous de ce gros morceau de bois.